L’an dernier, l’organisme Dnaagdawenmag Binnoojiiyag Child and Family Services a remarqué quelque chose de puissant dans son programme parental pour les familles autochtones.
Un père, qui avait grandi dans une famille d’accueil et qui avait vécu des traumatismes importants, hésitait à participer au programme au début; il a même raté la première séance. Mais lorsqu’il s’est joint à la séance suivante, il s’est ouvert au programme, s’est inscrit dans un programme culturel pour la petite enfance et est devenu l’un des premiers, avec sa famille, à essayer Theraplay, une approche fondée sur le jeu qui renforce les liens entre les parents et les enfants.
Avec le soutien du parent qui prend soin de l’enfant*, il a appris comment interagir avec son tout-petit d’une manière ludique et enrichissante. Il se prépare maintenant à la réunification, un jalon qui lui paraissait auparavant hors de portée.
Cette transformation a été rendue possible en partie grâce au financement des Initiatives en matière d’innovation de 2024 de l’Institut du savoir, qui ont permis à l’organisme Dnaagdawenmag d’adapter le cercle de sécurité parental de manière à ce qu’il reflète la culture, les valeurs et les expériences vécues des familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
En combinant les modèles thérapeutiques occidentaux aux enseignements et pratiques autochtones, le programme aide les parents à comprendre d’abord leurs difficultés avant d’établir des liens plus solides avec leurs enfants.
En s’appuyant sur le succès de l’an dernier, l’organisme fait à nouveau partie des Initiatives en matière d’innovation de 2025 pour élargir le cercle de sécurité avec un nouveau programme appelé « fondation Theraplay ». Ce programme crée un cheminement de guérison adapté à la culture, en réintroduisant le jeu et la joie comme outils essentiels pour surmonter les traumatismes intergénérationnels et soutenir les besoins émotionnels des familles autochtones.
Nous nous sommes entretenus avec Peggy McGee, superviseure des services de l’organisme Dnaagdawenmag Binnoojiiyag Child and Family Services, pour en apprendre davantage sur le chemin parcouru depuis le projet de l’année dernière jusqu’à l’innovation de cette année et sur les raisons pour lesquelles le jeu et la joie sont des outils essentiels pour guérir les traumatismes intergénérationnels et favoriser le bien-être.
En 2024, nous avons travaillé avec New Path Youth and Family Services pour adapter le cercle de sécurité parental aux familles des Premières Nations, inuites et métisses que nous côtoyons. Nous avons conservé l’essentiel du programme, mais nous y avons intégré des enseignements autochtones et nous avons consulté étroitement les Aînés et les équipes culturelles de notre organisation pour nous assurer que le programme trouvait un véritable écho auprès des familles.
Plus de 100 parents et prestataires de soins se sont inscrits, et 77 d’entre eux ont suivi les huit séances. C’est ainsi que nous avons su que nos familles se sentaient concernées par la matière.
Le module « Être avec » du cercle de sécurité parental a marqué un tournant. C’est pendant ce module que les parents réfléchissent à leurs propres expériences d’enfance et à la façon dont elles façonnent leur rôle parental aujourd’hui. Pour bon nombre d’entre eux, cette étape a été difficile, surtout pour ceux qui subissent les répercussions de politiques gouvernementales nuisibles qui ont perturbé les liens familiaux des Autochtones.
Mais la réflexion ne suffisait pas. Les parents nous ont dit : « Maintenant que je comprends pourquoi j’ai de la difficulté, j’ai besoin d’aide pour savoir quoi faire ensuite. » C’est là que l’idée de Theraplay a émergé.
Le cercle de sécurité aide les parents à comprendre l’attachement et les besoins émotionnels de leur enfant. Theraplay leur donne les outils nécessaires pour répondre à ces besoins sur le moment grâce à la structure, à l’engagement, au soutien et aux défis.
Nous intégrons ces principes pendant le «Saghidig encadré» (temps en famille). Le personnel observe les interactions parents-enfants, élabore un plan ensemble et met en pratique de nouvelles façons de jouer, d’intervenir et d’établir des liens. Il s’agit de s’asseoir par terre, d’établir un contact visuel et de construire ces expériences joyeuses et instantanées qui aident les enfants à se sentir en sécurité et valorisés.
Notre objectif ultime est de réduire le nombre d’enfants pris en charge et d’aider ceux qui sont pris en charge à retrouver leurs parents plus rapidement. Lorsque les parents se sentent plus confiants et plus compétents, et que les enfants font l’expérience d’un contact cohérent et joyeux, les relations s’améliorent.
Nous avons déjà constaté que les moments passés en famille, qui étaient auparavant tendus et gênants, sont devenus des moments que les parents et les enfants attendent avec impatience. Ce changement jette les bases d’une stabilité à long terme.
Commencez par consulter la communauté : les Aînés, les dirigeants culturels et les fournisseurs de services locaux. Établissez de solides partenariats avec des organisations autochtones et non autochtones, comme nous l’avons fait avec New Path. Une fois que votre programme est lancé, partagez votre travail dans la communauté et lors de conférences. Cette visibilité renforce la confiance, ouvre des portes et crée de la demande.
La culture façonne qui nous sommes en incluant notre identité, nos relations, notre façon de guérir. Pour les familles autochtones, la culture est la pierre angulaire du rétablissement après un traumatisme intergénérationnel. Si nous ne tenons pas compte de la dimension culturelle, nous ne soutenons pas la personne dans son ensemble.
Notre approche considère le bien-être émotionnel, spirituel, physique et mental comme étant interrelié. Lorsque les familles parviennent à concilier ces quatre éléments, elles peuvent véritablement s’épanouir.
Grâce au programme Initiatives en matière d’innovation, l’organisme Dnaagdawenmag Binnoojiiyag démontre comment la combinaison d’outils thérapeutiques et de connaissances culturelles peut transformer les soins, non seulement pour les familles individuelles, mais aussi pour les systèmes qui les servent.
Remarque : Les réponses à l’entrevue ont été modifiées et condensées pour plus de clarté.
* Le terme « parent qui prend soin de l’enfant » est de plus en plus utilisé dans les contextes de protection de l’enfance comme un terme plus inclusif et respectueux que « parent de famille d’accueil ».